Repos mérité [Kyo]

Je me laissai lentement glisser le long du mur en me tenant le poignet. Pourquoi est-ce que ça devait m'être arrivé hein? Jusqu'à présent j'avais réussi à ce qu'aucun client ne me blesse! Même s'ils cassaient les tabourets de mon bar, ça s'arrêtait là... et dire que pour une fois je n'avais provoqué personne, c'était à se demander s'il n'aurait pas mieux fallu que je le fasse plutôt que de laisser ce type me parler et me reluquer comme ils le faisaient.

J'avais vraiment très mal, mais je ne pouvais même pas sortir d'ici, les hôtes n'étaient pas encore tous partis et avec tout le sang que j'avais sur le bras, ce serait du suicide, même si je n'avais pas spécialement peur d'eux. J'aurais du être plus prudent, j'aurais du le voir revenir et voir qu'il allait faire quelque chose d'idiot... Je soufflai et enlevai ma main de mon bras pour voir les dégâts. J'avais une entaille d'au moins quatre centimètres, mais ça ne semblait pas plus profond que ça... ça avait saigné beaucoup voilà tout.

Après encore de longs instants, la porte s'entrouvrit sur l'un des autres employés du Club. Il m'adressa un petit sourire, je vis qu'il était prêt à partir.

- Kyoichi, tu peux sortir maintenant, les derniers hôtes viennent de partir. Tu veux que je t'attendes?

- Non, ne t'en fais pas pour moi je vais me débrouiller... a demain.

Il me fit un signe de main et s'éloigna. Je me relevai et partis dans le vestiaire des employés pour me soigner - enfin -. En plus de ça, je devais toujours ranger et nettoyer mon bar, à quelle heure allais-je partir encore hein?

Je ne partis qu'une bonne heure après les autres, il était presque 3h maintenant et je prenais le chemin de mon appartement. Quelle soirée de merde, je crois que ça avait été la pire de toute. Non seulement je m'étais pris la tête avec l'un des hôtes en début de soirée pour une brouille - pour pas changer -, mais en plus j'avais eu que des proivrots comme clients... et puis ensuite l'autre qui m'avait blessé. Et pourtant avec tout ça, j'avais pas envie de rentrer chez moi, j'en avais marre d'être tout seul, c'était pesant à la fin... mais je n'avais pas vraiment le choix.

Je ne mis pas longtemps à revenir au lotissement, je me dirigeai vers l'ascenseur. Les portes s'ouvrirent et je m'engouffrai dans la cabine, j'appuyais le sur un bouton sans regarder, j'avais l'habitude depuis le temps. Après quelques minutes, les portes se rouvrirent et je sortis de la cabine, mais le couloir n'était pas le même que le mien... ah non je m'étais trompé d'étage, quel boulet! Je soupirai puis me rendis compte qu'il s'agissait de l'étage où se trouvait l'appartement de Hisaki. Je m'appuyai contre le mur, hésitant. Je ne pouvais quand même pas aller le voir, pas à cette heure-ci même si je savais qu'il ne dormait pas...

Mais moi non plus je n'avais pas envie de dormir, peut-être que je ne le dérangerais pas... J'avais nettoyé tout mon sang en plus alors il ne s'en rendrait sûrement pas compte. Je rebaissai la manche de mon chandail et avançai doucement dans le couloir jusqu'à arriver devant la porte de l'appartement d'Hisaki. Je me mordis la lèvre et frappai faiblement, de toute façon il m'entendrait et comme ça je n'avais pas peur de déranger les voisins.

Han non mais qu'est-ce que je faisais? Qu'est-ce qui me prenait de venir le voir au beau milieu de la nuit hein? En plus il n'avait pas travaillé alors il avait peut-être juste envie d'être tranquille et tout seul, contrairement à moi. Pff décidément c'était pas ma soirée.

- Kyoichi ?

- Bah reste pas la. Fait comme chez toi.

- Qu'est-ce qui t'amène ici si tard ?

J'avais la désagréable impression de ne pas être à ma place en ce moment-même. Je ferais mieux de partir, je savais que c'était la meilleure chose à faire. Qu'est-ce qui me prenait d'aller chez les gens à cette heure-ci? Même si je ne risquais pas de le réveiller, ce n'était pas une très bonne idée de s'imposer comme ça chez les gens... je savais qu'en plus Hisaki ne me dirait pas de partir même si je le dérangeais. J'avais quand même passé l'âge d'aller me réfugier dans son giron quand quelque chose n'allait pas hein!

Je soupirai doucement, priant presque pour qu'il ne soit pas là, ou pour qu'il ne vienne délibérément pas m'ouvrir, comme ça je pourrais partir et n'aurais plus de raison de me sentir mal à l'aise. Malheureusement - enfin pas vraiment d'ailleurs -, j'entendis des pas résonner derrière la porte, une partie de moi me hurla de prendre mes jambes à mon cou, et l'autre était tétanisée. Qu'allais-je lui dire sur la raison de ma présence hein? Il ne fallait quand même pas qu'il se fasse du souci pour moi parce qu'il s'était passé quelque chose au club, de plus il le saurait, mais je ne savais pas si je devais lui dire moi-même ou non... La porte s'ouvrit.

- Kyoichi ?

Je fis un petit sourire, il paraissait très étonné de me voir, peut-être bien d'ailleurs aussi étonné que moi quand je m'étais rendu compte de l'étage où j'avais atterris. Mais bon, même s'il paraissait surpris, il ne semblait pas mécontent alors ce n'était peut-être pas si grave que je sois venu le voir.

Il attrapa ma main pour me faire entrer, et je remarquai aussitôt que la chaleur de sa peau était presque similaire à la mienne. Je ne pus m'empêcher de sourire, voilà pourquoi personne n'avait rien découvert pour le moment, les vampires n'étaient pas si différent de nous sur certains points, et c'était un peu rassurant je dois dire. En tout cas pour moi qui travaillais avec eux, je me sentais moins déphasé. Mon regard se posa un instant sur lui et je remarquai alors qu'il était torse nu. Han bon Dieu quel corps!! J'en serais presque jaloux, si je ne le trouvais pas outrageusement attirant. Ce n'était pas un hôte pour rien hein! Ces pensées s'évanouirent lorsqu'il relâcha ma main - mon esprit ne se fixant plus que sur le regret d'un contact si court - et il referma la porte d'entrée.

J'ouvris la bouche pour dire quelque chose, mais il avait déjà filé dans une autre pièce et moi je restais planté là. Je soupirai silencieusement et laissai mon regard se poser sur le couloir. Je devais bien avouer qu'il ressemblait pas mal au mien, enfin c'était sûrement normal, ils ne s'étaient pas embêtés à faire des appartements tous différents, nous n'étions que des employés... ils s'étaient probablement plus consacrés aux habitations des clients.

Après quelques instants, Hisaki revint, vêtu d'un T-shirt de couleur sombre. Je reportai mon attention sur lui.

- Bah reste pas là. Fais comme chez toi.

Je répondis à son sourire et hochai doucement la tête en me disant que ce ne serait pas difficile si les ressemblances continuaient ainsi. J'avançai jusqu'à ce qui me sembla être le salon, et je constatais que la disposition des meubles était différente, et moi-même j'avais changé la place de certains meubles alors tout le monde devait avoir fait pareil en fait.

Je m'approchai du canapé et m'y installai. Je croisai les jambes et posai mon coude sur mon genoux avant d'appuyer mon menton sur ma main. Mon regard se posa sur le bandage que j'avais au poignet, même s'il était caché par mon chandail, on en voyait quand même la forme. Je n'avais plus vraiment mal, j'espérais seulement que je ne me remettrais pas à saigner je ne devais pas faire de mouvement brusque. Ah quel idiot, je n'aurais pas du venir, j'allais le torturer si la blessure saignait à nouveau...

Je relevai la tête en entendant à nouveau les pas de Hisaki s'approcher, et il déposa un verre sur la table basse devant moi. Alala hôte jusqu'au bout des ongles.

- Qu'est-ce qui t'amène ici si tard ?

J'aurais du me douter qu'il me poserait cette question, n'importe qui se la poserait... et même en pleine journée, on ne débarquait pas chez les gens comme ça sans raison... enfin si, entre amis on pouvait... mais pas à 3h du matin! Je fis un sourire à Hisaki, bien décidé à ne pas lui réveler la vraie raison de ma présence.

- Eh bien, je n'avais pas vraiment sommeil et quand je me suis rendu compte que je m'étais trompé d'étage, je me suis dit que je pouvais venir te voir.

Bon au final, je ne lui mentais pas, j'avais simplement omis volontairement quelques détails. En plus ça ne servait pas à grand chose qu'il save ou pas, si ce n'était qu'il préfèrerait sans doute que je parte pour ne rien risquer... mais je n'avais décidément pas envie de rester tout seul... et même si j'étais un peu inquiet d'être venu à cette heure et que j'étais toujours secoué par la soirée qui venait de s'écouler, sa présence m'apaisait, comme à chaque fois d'ailleurs.

- Gomen, tu aurais sans doute préféré que personne ne vienne t'ennuyer alors que c'est ton jour de repos.

Et dieu sait si je pouvais être embêtant, quoique ce soir peut-être pas... mais bon tout de même. Et puis il ne se poserait peut-être pas plus de questions vu que j'agissais relativement normalement neee? Je l'espérais en tout cas, je n'arriverais sans doute pas à lui mentir ouvertement.

- Eh bien, je n'avais pas vraiment sommeil et quand je me suis rendu compte que je m'étais trompé d'étage, je me suis dit que je pouvais venir te voir.

- Gomen, tu aurais sans doute préféré que personne ne vienne t'ennuyer alors que c'est ton jour de repos.

- Quelque chose c'est passé ce soir ?

- Tu m'explique ?

Mes paroles eurent pour effet de lui faire hausser un sourcil. Pourquoi était-il étonné que je dise ça? Que je m'excuse? Bon, certes ici on était bien loin des grandes villes et du savoir-vivre habituel, cette île était un monde à part entière, et puis une partie des habitants n'étaient même pas censé exister dans cette réalité mais ce n'était pas une raison pour faire tout et n'importe quoi tout de même... Il était bien trop tard pour qu'une personne normale s'invite chez quelqu'un, même si c'était un ami de longue date... mais peut-être que ni lui ni moi n'étions normaux après tout... pour lui c'était certain, pour moi c'était peut-êter pas nouveau non plus d'ailleurs.

Je détournai légèrement les yeux, il était en face de moi après tout, et je ne voulais pas qu'il ait l'impression que je le fixais de trop... quoiqu'il devait avoir l'habitude de toute manière, personne ne pouvait s'empêcher de le regarder au Club, lui comme les autres hôtes d'ailleurs, m'enfin bon ce n'était pas une raison pour que je le fasse moi aussi.

Lorsque je reposai mon regard sur lui après quelques instants, je vis qu'il fronçait les sourcils. Ah là ce n'était pas bon du tout pour moi... En quelques secondes l'ambiance avait changé, mais je ne savais pas comment ni pourquoi. J'avais un peu l'impression d'être un gosse qui a fait une grosse bêtise et qui vient de se faire découvrir... pourquoi cette impression tout d'un coup?

- Quelque chose s'est passé ce soir ?

Gloups! Je déglutis difficilement et me mordis légèrement la lèvre. Allez, deux minutes montre en main pour découvrir que je cachais quelque chose, Hisaki était vraiment trop perspicace pour moi, c'était injuste. N'empêche que ça commençait vraiment mal comme simple visite de courtoisies. Je lme retins de soupirer.

Il se leva et contourna la table, je le regardai faire, à la fois inquiet et intrigué. Il s'approcha de moi, qu'allait-il fait? Non, je n'avais pas peur qu'il me fasse du mal, ce n'était pas le problème... je me demandais juste ce qu'il allait me dire à présent. Devais-je lui avouer ce qui était arrivé? Je craignais qu'il me demande de partir, et je n'avais pas envie d'être tout seul, je voulais rester avec lui, ne serait-ce qu'encore un tout petit peu.

Il s'accroupit finalement devant moi et je ne le quittai pas des yeux. Ses doigts attrapèrent mon poignet et remontèrent doucement la manche de mon chandail. Ooops... Je retins mon souffle, bon maintenant j'avais pu vraiment le choix que de lui dire la vérité... la seule "excuse" que je pourrais lui dire pour encore lui cacher serait que je m'étais tailladé mais j'étais pas vraiment sûr que ça le rassure des masses... en même temps, lui dire qu'un client avait pété un câble c'était peut-être pas mieux, ils étaient de plus en plus nombreux ces temps-ci. Hisaki releva les yeux vers moi.

- Tu m'expliques ?

Je détournai les yeux en soupirant silencieusement alors qu'il s'asseyait sur l'accoudoir du canapé, juste à côté de moi. Bon une bonne chose pour moi, il n'avait pas l'air de vouloir me demander de partir, d'ailleurs il n'avait toujours pas lâché ma main. Me rendant compte de cela, je baissai les yeux pour regarder ses doigts enlaçant mon poignet, cela me paraissait presque étrange... que sa peau soit à ce point similaire à la mienne alors qu'il lui arrivait d'être si glacée, et je devais avouer que j'adorais ça. Pourtant j'étais plus habitué à ne pas aimer tout ce qui était froid, me donnait froid ou autre - enfin sauf les glaces, mais ça c'était sucré alors ça comptait pas -. Il me lâcha et je relevai les yeux vers lui. Pourquoi me lâchait-il?

Je devais probablement lui répondre maintenant... oui, c'était sûrement une bonne chose à faire avant qu'il ne se sente obligé d'insister encore. Je passai doucement mes doigts sur le bandage.

- Ce n'est... pas aussi grave que ça en a l'air, tu sais.

Je ris doucement. Si, ça l'était sans doute mais je ne voulais pas dramatiser les choses, ce n'était pas mon genre et je voulais pas le faire paniquer.

- Un client s'est un peu emporté... enfin, la routine quoi.

Je souris à nouveau. Prendre un air désinvolte, voilà tout ce que je savais faire, tout ce que je pouvais faire. De toute façon maintenant c'était passé, personne ne s'était inquiété pour moi pendant que j'étais dans le local mais après tout c'était ce que je voulais, non? N'inquiéter personne... ne jamais laisser les autres se faire du souci pour moi. J'aurais voulu pouvoir laisser ça transparaître de temps en temps pourtant, mais là c'était impossible. Pas avec Hisaki qui était l'inquiétude et la prudence personnifiées.

- Ce n'est... pas aussi grave que ça en a l'air, tu sais.

- Un client s'est un peu emporté... enfin, la routine quoi.

- Je peux regarder ?

- Gomen...

- Je vais essayer de trouver quelque chose pour réparer ma bêtise.

Je regardais discrètement son visage pour essayer de voir s'il allait se mettre à paniquer ou autre. Je dois dire que venant de lui ça ne m'étonnerait pas vraiment. Mais comme je le sentais à la chaleur de sa peau, il devait avoir mangé il y a peu de temps donc peut-être qu'il resterait plus calme, du moins j'osais l'espérer.

Mais j'attendais toujours une réaction de sa part cela dit, quelle qu'elle soit, il allait bien falloir qu'il fasse quelque chose. Finalement, il reprit mon poignet entre ses doigts, je le regardai plus franchement. Non mais il voulait quand même pas...?

- Je peux regarder ?

Eh si, il voulait... il défit lentement le bandage autour de mon poignet, je me mordis l'intérieur de la lèvre et détournai le regard. Non, je n'étais pas chochotte, mais j'avais eu tout le loisir d'admirer ce que cet abruti m'avait fait alors j'avais plus trop envie de poser le regard dessus. Je savais parfaitement comment elle était, et je savais aussi qu'elle était toujours un peu douloureuse mais bon... je n'allais pas mourir à cause de ça... enfin en principe, mais là je ne risquais pas grand chose.

Je sentis qu'il passait un doigt sur ma peau et la douleur se fit un peu plus vive avant que je ne sente mon sang couler à nouveau. Oh non! Je le regardai à nouveau, cette fois c'était moi qui allait paniquer.

- Gomen...

Il se leva, ce qui m'obligea à faire de même, et il me remorqua ainsi jusqu'à la salle de bain. Il ouvrit l'eau froid et plaça mon bras dessous. Ah non mais quel idiot d'avoir voulu y toucher aussi. Qu'est-ce qui lui avait passé par la tête hein? C'était stupide, je venais juste de me blesser... bon, peut-être aussi qu'il aurait fallut quelques points, que la blessure était plus profonde que ce que je pensais, mais tout de même... c'était vraiment pas malin. Et dire que je pensais quelques minutes avant qu'il était plus prudent que n'importe qui... là je me demandais vraiment hein.

Il lâcha mon bras et ouvrit l'armoire à pharmacie. J'arquai un sourcil - ce qu'il ne put pas voir -, les vampires avaient de quoi soigner? ça me paraissait un peu étonnant en fait, c'était pas vraiment le genre de choses auxquelles ils avaient à penser. Surtout que pour soigner, ils n'avaient besoin de rien de spécial, je le savais bien... comme je savais à peu près tout ce qu'il fallait savoir sur les hôtes.

- Je vais essayer de trouver quelque chose pour réparer ma bêtise.

Beh apparemment non il avait rien, là je trouvais ça déjà plus logique. Mais bon ce n'était pas une raison pour faire des pieds et des mains pour me soigner, je me débrouillerais bien tout seul. Ah non mais j'aurais du savoir ce qui se passerait, encore une fois c'était quelque chose que j'aurais du prévoir, comme j'aurais du prévoir que le client reviendrait m'ennuyer.

Je coupai l'eau et reposai ma main sur mon poignet pour tenter plus efficacement de faire cesser le sang de couler. De toute manière, restait ici ne serait bon ni pour lui, ni pour moi par conséquent même si je n'y croyais pas vraiment... quoiqu'il arrive j'étais persuadé qu'Hisaki ne me ferait rien. J'avais confiance - trop peut-être? - mais je n'y pouvais rien après tout.

- T'occupes pas de ça, laisse tomber.

C'était pas vraiment son rôle de s'occuper de moi quoi, ou de réparer mes bêtises. Je ne voulais pas que mon sang lui donne faim alors qu'il aurait normalement pu tenir quelques temps sans en boire à nouveau. Je baissai la tête sur mon bras.

- J'aurais pas du venir, je m'en doutais... chuchotai-je.

C'était ça le pire! Je savais que je n'aurais pas du venir mais j'étais venu quand même! Comme quoi parfois j'étais vraiment pas raisonnable... quoique, je n'étais pas non plus réputé pour être raisonnable hein... mais tout de même, là c'était suicidaire de faire ce que j'avais fait. Personne de normalement constitué n'irait voir un vampire en étant blessé... personne n'irait voir un vampire tout court d'ailleurs...

Je tournai les talons et repartis vers l'entrée. Moi qui voulais que notre amitié reparte du bon pied, je crois que là j'avais plutôt foutu un froid qu'autre chose... on est un boulet ou on l'est pas hein, y a pas de juste milieu.

- T'occupes pas de ça, laisse tomber.

- J'aurais pas du venir, je m'en doutais... chuchota-t-il.

- Bébé tu peux rester ici s'il te plaît.

- Tu as confiance en moi ne ?

Une fois chez moi je me soignerais, et ensuite j'essaierais de ne plus me blesser au Club. Je ne sais pas ce que j'avais le plus détesté... saigner en présence d'une bonne vingtaine de vampires ou bien être enfermé seul dans un local pas vraiment spacieux en attendant que mon sang s'arrête de couler, et me demandant d'ailleurs s'il cesserait un jour. Bon, heureusement que je n'étais pas réellement maladroit, car sinon ce ne serait même pas la peine de tenter de travailler au Club, si je devais manquer me retrouver entouré de fauves sanguinaires à la moindre égratignure. Bon, certes c'était le cas de toute manière mais je n'avais pas vraiment grand chose à craindre vu que je savais ce que je faisais.

Et encore une fois, là, je savais ce que je devais faire. Je rentrerais et oublierais simplement ce qui s'était passé, j'agirais avec Hisaki comme si je n'étais pas venu ce soir, et même s'il voulait y faire allusion je pourrais toujours éluder le sujet... c'était quelque chose que je faisais assez souvent pour éviter toute dispute avec qui que ce soit. Certains s'en étaient rendus compte et faisait avec, d'autres nom et continuer à me prendre la tête alors que je les ignorais royalement... comme quoi, je n'étais pas le seul à être un boulet.

J'entendais les pas de Hisaki derrière moi, et j'espérais en mon fort intérieur qu'il ne me retienne pas. Si je voulais partir, c'était légitime après tout alors je préférais qu'il ne veuille pas que je reste, ce serait plus simple pour moi comme pour lui je dois dire. Et je crus réellement que j'allais pouvoir partir.

Arrivé devant la porte d'entrée, je posai la main sur la poignet et aussitôt je sentis les doigts d'Hisaki s'enrouler doucement autour de mon bras.

- Bébé tu peux rester ici, s'il te plaît.

Mon coeur rata un battement et je tournai la tête vers Hisaki. C'était un surnom que je n'avais pas entendu depuis tellement longtemps, il n'y avait évidemment que lui pour m'appeler comme ça... mais j'avais 10 ans à l'époque. Je n'aurais pas pensé qu'aujourd'hui encore il m'appellerait de cette manière. J'aimais à l'époque, et j'étais un peu surpris de me rendre compte que cela me faisait toujours le même effet. C'était peut-être mièvre, je l'étais peut-être en un sens.

Je me retournai complètement vers lui alors qu'il repoussait ma main que j'avais posé sur la plaie, je fronçai imperceptiblement les sourcils et il plongea son regard dans le mien. Un petit sourire prit place sur ses lèvres, un sourire que je trouvai rassurant... comme chacun de ses sourires pour moi d'ailleurs.

- Tu as confiance en moi ne ?

Je hochai lentement la tête malgré moi. Non il n'allait quand même pas... je savais bien les capacités qu'il avait, mais de là à ce qu'il s'en serve réellement sur moi, venant de lui c'était tellement innatendu... et d'ailleurs, même lui ne semblait pas sûr. Il s'agenouilla devant moi, approchant sa bouche de mon bras. J'eus un dernier mouvement de recul, infime... je n'étais même pas sûr qu'il s'en soit aperçu en fait. Je cessai de respirer quand ses lèvres se posèrent sur ma peau, puis se fut sa langue chaude qui passa sur la blessure, je frissonnai légèrement. La brûlure de la blessure commença alors à s'estomper.

J'avais confiance en lui, je ne lui avais dit, mais je n'aurais pas pensé qu'un vampire puisse avoir ce "sang-froid" et cette retenue... ni avoir simplement envie de soigner quelqu'un de toute manière. Je savais pourtant bien que Hisaki n'était pas comme les autres, ni comme les humains, ni comme la plupart des vampires. Après un instant, il se redressa et je recommençai à respirer normalement.

Je le regardais toujours tandis que son regard était posé sur mon bras. Puis il se releva et partit dans une autre pièce. Curieux, je baissai les yeux sur mon poignet, la plaie avait presque totalement disparu, il restait juste une légère cicatrice encore plus pâle que ma peau ne l'était déjà. Plutôt que d'aller tout de suite rejoindre Hisaki, je retournai dans la salle de bain. Mon bras et ma main étaient toujours couvert de sang, il fallait que je nettoie ça pour ne pas le tenter plus qu'il ne l'avait été. Je les passai donc rapidement sous l'eau et les essuyai.

Je rejoignis ensuite Hisaki dans ce qui se trouvait être la cuisine. Je restai dans l'encadrement de la porte et posai mon regard sur lui.

- Merci Hisaki.

C'était quand même la moindre des choses de le remercier, après tout il m'avait évité au moins deux semaines à devoir faire attention à mon poignet... et il avait pris sur lui pour moi. Je ne pouvais pas ne pas lui être reconnaissant d'avoir fait ça pour moi.

Je m'approchai de lui en voyant une petite trace de sang sur son visage, ce qui n'était pas tellement étonnant d'ailleurs.

- Tu as... du sang sur le visage, dis-je en tendant doucement la main.

Je posai le bout de mes doigts au coin de sa bouche et effaçai délicatement le sang avant de les porter à ma bouche pour lécher le sang. Voilà, 'a pu le sang! Après quelques secondes, je m'appuyai contre le comptoir et baissai doucement les yeux.

- Tu n'étais pas obligé de faire ça, tu sais... j'aurais pu rentrer chez moi et soigner ça moi-même...

Je ne comprenais pas vraiment pourquoi il m'avait demandé de rester, ça n'aurait pas changé grand chose pour lui, que ce soit lui qui me guérisse ou que j'aille dans mon appartement pour m'occuper moi-même de moi comme je l'avais toujours fait, il n'y avait aucune différence.

- Merci Hisaki.

- Tu as... du sang sur le visage, dit-il en tendant doucement la main.

- Tu n'étais pas obligé de faire ça, tu sais... j'aurais pu rentrer chez moi et soigner ça moi-même...

- Je ne voulais pas que tu partes...Et puis maintenant tu pourras travailler sans te soucier que tu peux ré-ouvrir ta plaie ne ?

- Avoue que d'avoir un ami comme moi c'est utile héhéhé.

Je ne relevai pas la tête, même alors qu'il ne répondait pas à ce que je venais de dire. Hum mais au fond, il n'y avait pas grand chose à répondre. Je lui avais simplement dit ce que je pensais, point. N'importe qui m'aurait probablement laissé faire d'ailleurs, n'importe qui aurait voulu partir comme je l'avais voulu hein... enfin même si au fond je n'avais pas réellement envie de partir. J'aimais être avec Hisaki, quelles que pouvaient être les situations qui se présentaient, sa présence irradiait tellement que je ne me souciais de rien d'autre que de lui... dans le sens où je ne voulais pas être un boulet pour lui, je voulais pouvoir être près de lui et ce que je souhaitais le plus au monde était de pouvoir lui rendre un jour tout ce qu'il faisait pour moi... cela me tenait vraiment à coeur même si une telle occasion ne se présenterait jamais, j'en avais conscience. ça ne m'empêchait pourtant pas d'y croire. J'avais de la chance de pouvoir être à ses côtés, il fallait qu'il sache à quel point je pouvais m'en rendre compte.

- Je ne voulais pas que tu partes... Et puis maintenant tu pourras travailler sans te soucier que tu peux rouvrir ta plaie ne ?

Je relevai la tête vers lui, mais sa phrase m'avait tellement surpris que je ne parvins même pas à lui rendre son sourire. Il ne voulait pas que je parte, il me disait ça comme si c'était tout bête... sans doute que pour lui ça l'était, mais pour moi c'était plus que ça... ça me rendait heureux qu'il veuille que je reste avec lui. Cela n'aurait d'ailleurs peut-être pas du m'étonner, je devais bien être conscient de l'affection qu'il avait pour moi, de part la façon dont il me parlait, le surnom qui était revenu après toutes ces années... mais je crois que je ne réalisais pas totalement encore.

Il prit à nouveau mon bras dans sa main, sans doute pour constater que j'étais à présent complètement guéri. J'étais d'ailleurs - et surtout - soulagé de ne plus avoir mal, mais il avait raison, je pourrais reprendre le travail comme si de rien n'était... et comme personne n'avait vu que j'étais blessé - en dehors de ceux du club et celui qui m'avait blessé bien entendu -, je n'aurais pas besoin de porter de bandage pour cacher une pseudo-blessure, ni de trouver d'excuse pour un rétablissement qui se serait évidemment fait bien trop rapidement... oui, parce que j'aurais forcément oublié un jour de mettre le bandage, à force cela m'aurait énervé de cacher quelque chose qui n'existait pas. Hisaki releva les yeux vers moi.

- Avoue que d'avoir un ami comme moi c'est utile héhéhé.

Cette fois, je ne pus m'empêcher de sourire et je hochai doucement la tête. Evidemment, je ne pouvais que l'avouer, même si notre amitié ne se résumait pas qu'à ça, ce n'était pas négligeable...

Je sortis de mes pensées quand, tenant toujours mon bras, il m'entraîna dehors, sur le balcon. Je m'appuyai dos contre la rambarde en soupirant doucement alors qu'il sortait une chaise. J'avais passé la soirée debout derrière mon comptoir, je pouvais bien tenir encore, ce n'était pas comme si j'avais pas l'habitude après tout. Je le regardai un instant puis détournai les yeux pour me concentrer sur le paysage de l'île qui se présentait à nous. Ah, la vue ici n'était pas la même que chez moi, je voyais l'autre côté de la ville, mais j'avais toujours adoré les paysages urbains... j'étais fait pour vivre en ville de toute manière, n'importe où ailleurs je me sentirais perdu c'était certain.

Je fermai les yeux une seconde alors que le vent balayait mon visage avec douceur, il était tiède et agréable, et je me surpris en moi-même à le comparer aux mains de Hisaki. Je rouvris alors les yeux tandis qu'une question venue de nulle part s'imposa à moi. C'était stupide, pouvais-je lui demander ça? Me répondrait-il? Pourtant j'étais bien curieux de savoir... ça ne m'avancerait à rien en fait mais tout de même.

- Ne Hisaki... quel goût à mon sang?

Je le regardai, gardant un visage aussi neutre que possible. Je voulais savoir, mais je ne voulais pas qu'il s'imagine que cette question en amènerait d'autres. Ce n'était pas mon but, je devais avoir l'esprit un peu morbide ce soir voilà tout.

- Enfin je veux dire... par rapport au sang que tu bois habituellement ici.

Je savais beaucoup de choses sur Rakuen grâce aux dossiers de mon père, mais il y avait une chose que Kinoshita-san s'était bien gardé de dévoiler, c'était la façon dont il se procurer le sang, d'où il provenait, et pourquoi parvenait-il à en avoir en si grande quantité sans que personne ne soupçonne rien. Je savais bien, que ça ne devait rien être d'horrible ou de scandaleux - quoique - mais je me demandais si ce sang convenait à tous les vampires. Après tout, ils étaient comme nous sur ce point, les goûts étaient différents pour tous.

- Ne Hisaki... quel goût à mon sang?

- Enfin je veux dire... par rapport au sang que tu bois habituellement ici.

- Humm tu sais c'est délicat comme sujet. Mais je suppose que tu veux la vrai vérité ne ? Que peut importe ce je dirais tu sauras si je mens.

- Hummm tu sais le sang que je bois habituellement c'est pas toujours de la qualité #1. Donc je ne peux pas comparer ton sang à ça, Je voudrais bien pouvoir dire que je n'y est pas gouter, mais j'ai gouter sans le vouloir. Et ton sang goute bon bien meilleure que ce que j'ai but avant. Mais ne t'inquiète pas, je sais me retenir.

Je dois dire que... non, je ne m'attendais pas à ce qu'il réponde. Ma question n'était pas forcément des plus adéquat à cet instant alors que peut-être il ne voulait plus y penser. Mais après tout, il n'aurait qu'à me dire qu'il ne voulait simplement pas répondre, ou alors il pouvait changer de sujet comme si de rien n'était. Je ne pourrais pas lui en vouloir, pour moi c'était une question comme une autre et je n'en ferais pas une affaire d'état s'il ne me disait rien après tout.

Il se détourna de moi et posa son regard vers l'intérieur de l'appartement, croisant les bras sur son torse. Il semblait réfléchir, je détournai moi aussi mon regard, regardant à nouveau dehors, attendant de voir ce qu'il me dirait. Bien qu'en cet instant, j'avais la certitude que je n'aurais aucune réponse à ma question, tant pis je n'en mourrais pas. Quelle idée de parler de sang avec un vampire de toute manière, il allait se mettre à penser que j'étais suicidaire, ou que je cherchais un moyen de me faire une frayeur en voulant tenter quoique ce soit... ce qui - à bien y penser - n'aurait pas été totalement impossible venant de moi. J'aimais bien me faire peur de temps en temps, mais là ce serait vraiment trop.

- Humm tu sais c'est délicat comme sujet. Mais je suppose que tu veux la vraie vérité ne ? Que peu importe ce que je dirais, tu sauras si je mens.

Je levai les yeux vers lui, une seconde pour m'apercevoir qu'il ne me regardait toujours pas. C'était certain, s'il me mentait je le saurais, je le connaissais assez bien pour ça en fait... enfin je suppose. Mais je ne le forçais pas à me répondre de toute manière, il semblait réticent à l'idée de me dire quoique ce puisse être là dessus d'ailleurs. Bon tant qu'à me dire quelque chose, autant que ce soit vrai après tout, sinon ça ne servait à rien. Il se racla la gorge.

- Hummm tu sais le sang que je bois habituellement c'est pas toujours de la qualité #1. Donc je ne peux pas comparer ton sang à ça. Je voudrais bien pouvoir dire que je n'y ai pas gouté, mais j'ai gouté sans le vouloir. Et ton sang goûte bien meilleur que ce que j'ai bu avant. Mais ne t'inquiète pas, je sais me retenir.

Je le regardai une nouvelle fois et lui rendis son sourire en secouant doucement la tête. Ce qu'il venait de me dire m'amusait plus qu'autre chose. Ne pas m'inquiéter? N'avait-il pas compris que je ne m'inquiétais jamais de ça? Je lui avais déjà dit, pourtant, que j'avais confiance en lui, quoi qu'il pourrait arriver je ne me souciais absolument de rien lorsque j'étais avec lui... il était mon ami, qu'il soit vampire et moi humain m'importait peu, il pourrait même être celui qui était censé me donner la mort, je n'aurais pas peur.

- Je ne suis pas inquiet, dis-je simplement.

Mon sourire s'aggrandit et je levai les yeux pour regarder le ciel, les étoiles qui étincelaient dans l'encre sombre. Alors comme ça, il aimait le goût de mon sang plus que tout autre... je ne savais pas si cela signifiait quelque chose, pour lui, pour moi ou pour tout autre chose... si je devais être heureux ou bien apeuré comme il l'avait laissé entendre. Je soupirai doucement.

- La seule chose qui m'inquiète, la seule chose dont j'ai peur, c'est que Hisaki me laisse encore une fois... murmurai-je.

Ce devait être ça, ma plus grande hantise. C'était d'ailleurs normal après tout, je ne voulais pas que la personne qui comptait le plus pour moi reparte loin. Mais, ça ne se produirait pas, ne? Pas tout de suite... mais un jour c'était évident qu'il disparaitrait à nouveau. Je ne pourrais pas passer ma vie entière à ses côtés, nous n'étions définitivement pas du même monde et cela nous séparerait à un moment ou à un autre.

Ces pensées serrèrent mon coeur, mais cette douleur sourde fut éclipsé par la lueur d'une étoile filante, traçant l'espace d'une seconde une douce ligne scintillante dans l'obscurité. Un léger sourire prit place sur mes lèvres quand d'autres suivirent la première.

- Oh regarde Hisaki... des étoiles filantes.

Je levai la main pour les pointer du doigt, pour effacer les paroles que j'avais prononcées. Je ne voulais poser un voile triste sur le moment que nous passions, je ne voulais pas y penser. Je lui avais dit et ça se terminait là... j'en avais le droit non? Les étoiles étaient là pour exaucer mon voeu après tout.

Je n'étais qu'un gamin, j'aimais croire encore aux fabulations qu'on m'avait raconté quand j'étais petit. Mais un espoir, qu'il soit vrai ou non, reste un espoir tant qu'on y croit.

- La seule chose qui m'inquiète, la seule chose dont j'ai peur, c'est que Hisaki me laisse encore une fois... murmura-t-il.

- Oh regarde Hisaki... des étoiles filantes.

- Kyoichi je te fais la promesse de ne jamais t'abandonner. Jamais je ne partirais.

- Ne Kyo tu ne crois pas que ce soir est la plus belle depuis qu'on c'est revue sur cette île ?

Un léger silence s'installa. C'était quelque peu étrange d'ailleurs, encore une preuve que cette île était véritablement à part de tout. Nous étions en pleine ville et il n'y avait aucun bruit... pas de voiture, pas de gens qui crient, pas de musique démesurément forte. Alors qu'à Tokyo, même à 4h du matin, la ville était pleine de bruits plus insupportables les uns que les autres et contre lesquels on ne pouvait rien. Rakuen était vraiment l'endroit où tout était possible, il n'y avait aucun crime de commis ici - enfin en dehors des éclats des clients ivres -... rien de sérieux n'avait été recensé depuis l'ouverture de l'île, et pourtant elle était pleine de vampire. Aucun doute que si ça venait à se savoir, ce serait la panique et plus personne ne viendrait ici.

Les doigts de Hisaki me sortirent de mes pensées, se posant sur ma main, et ils s'entrelacèrent aux miens dans un geste doux et délicat dont seul Hisaki avait le secret, et qui me surprit. J'avais toujours tellement l'habitude d'être celui qui démontrait ouvertement l'affection que lorsque les autres faisaient de même, j'étais heureux, mais étonné. Mais ce qui me surpris bien plus, c'est quand je sentis ses lèvres se poser doucement sur ma main pour y déposer un doux baiser. Je ne pus m'empêcher de le regarder, même si lui regardait toujours le ciel. Un sourire se glissa sur mes lèvres dont je me mordis légèrement le coin pour ne pas laisser totalement échapper l'effet que son geste me faisait.

- Kyoichi je te fais la promesse de ne jamais t'abandonner. Jamais je ne partirais.

Mon sourire disparut. Je ne m'étais pas attendu à une telle promesse de sa part, je ne l'avais d'ailleurs même pas espéré. Si je lui avais dit que je redoutais qu'il parte, ce n'était pas pour qu'il tente de me rassurer, mais juste pour qu'il sache à quel point je pouvais tenir à lui. Néanmoins, cette promesse... une telle promesse, je savais que s'il la faisait, ce n'était pas des paroles en l'air, et que s'il me le disait c'était qu'il la tiendrait. Cela m'apaisait, je lui faisais confiance après tout, quoiqu'il me dise, quoiqu'il me promette j'y croyais simplement.

Après quelques instants, je relevai les yeux vers le ciel, pour essayer de ne pas laisser échapper les larmes que je sentais qui allaient me monter aux yeux rapidement. Non, je ne devais pas pleurer... même si ses paroles me touchaient au plus profond de mon coeur, je ne devais pas pleurer.

- Ne Kyo tu ne crois pas que ce soir est la plus belle depuis qu'on s'est revus sur cette île ?

Je souris une nouvelle fois et inspirai l'air de la nuit - qui n'était ni réellement frais, ni vraiment étouffant -. Oui, depuis que nous nous étions revu ici, c'était la première soirée que nous passions tous les deux, seuls, sans rien nous dire de blessant comme lorsque nous nous étions croisé au temple. Il faut dire, qu'à part notre après-midi qui s'était terminé à la plage, nous ne nous retrouvions presque jamais seul... ce n'était pas nécessaire après tout, enfin pour les autres ça ne le paraissait probablement pas... mais peut-être qu'à partir de maintenant nous pourrions nous voir plus souvent... ce serait tellement bien.

Je reposai mon regard sur mon vampire et hochai doucement la tête.

- Si... j'en suis persuadé.

Je resserrai doucement ma main dans la sienne et me rapprochai de lui. Il n'avait pas faim, je pouvais bien me serrer contre lui, ne? Et c'est d'ailleurs ce que je fis. Je posai ma tête sur son épaule et fermai les yeux en souriant. Ma main libre passa autour de sa taille. Encore une fois c'était moi qui l'étreignais, et je supposais qu'il ne le ferais probablement jamais franchement de lui-même, et je le comprenais... seulement, j'avais besoin de ces contacts avec lui. Etait-ce mal? De toute façon, si cela l'ennuyait, il pourrait toujours me repousser...

- Tu veux bien me serrer contre toi, comme sur la plage?

Je voulais qu'il me prenne réellement dans ses bras, pas simplement que je me blottisse contre lui... je voulais qu'il me rende mon étreinte, je voulais qu'il me câline, comme quand j'étais enfant et que je ne comprenais encore rien, qu'il ne pouvait pas me dire non quand je lui demandais de me tenir contre lui parce que je ne devais pas savoir ce qu'il était réellement. Ses douces étreintes m'avaient manqué, jusqu'à maintenant même si ce manque avait été passablement comblé par d'autres... ce n'était jamais la même chose, et c'était sa chaleur qui me manquait.

- Je t'aime Hisaki, murmurai-je.

Il était la personne la plus chère à mon coeur, et je n'arriverais jamais à lui exprimer cette façon qu'il avait d'avoir une place toute particulière que jamais personne n'avait réussi et ne réussirait à prendre. Aucun mot ne saurait exprimer cela, mais je pensais qu'un "je t'aime" était assez proche de cette réalité.

- Si... j'en suis persuadé.

- Tu veux bien me serrer contre toi, comme sur la plage?

- Je t'aime Hisaki, murmura-t-il.

- Kyoichi ne dit pas ça a la légère s'il te plait.

- Ne Kyo tu veux bien passé le restant de la nui avec moi ?

(22h22!!!!! o/)

Mes paroles eurent un effet immédiat, mais bizarrement j'aurais préféré qu'il soit tout autre. Il souffla. Mes paroles l'ennuyaient? Je ne disais que ce que je pensais, encore une fois d'ailleurs. Peut-être que je parlais trop justement, mais avec lui c'était normal que je ne lui cache pas ce que ressentais. Il était la personne avec qui je me sentais le mieux, si je ne pouvais pas lui dire à lui tout ce qui me passait dans l'esprit, je ne savais pas à qui je pourrais le dire. Je n'avais de secret pour personne, et je ne comptais pas non plus en avoir pour lui ce serait idiot.

- Kyoichi ne dit pas ça a la légère s'il te plait.

Il avait juste murmuré, mais je crois que cela rendit le choc de ses mots encore plus violent. Il me reprochait de lui dire que je l'aimais? Et puis, qu'est-ce qu'il en savait que je disais ça à la légère ou non hein? Il était dans ma tête? Non mais... qu'il soit surpris, ou gêné par ces mots je pouvais comprendre, mais là ça n'allait plus. Et je sais pourtant que je pouvais rien en dire, je n'allais pas me disputer avec lui parce qu'il ne voulait pas que je lui dise que je l'aimais, ce serait stupide...

Je me mordis la lèvre, baissant les yeux. J'aurais quand même préféré qu'il ne me donne pas l'impression d'avoir dit une bêtise, ce n'était pas le cas... mais pas mal de gens avait du mal à me comprendre, et malheureusement c'était le cas pour Hisaki aussi. Peut-être que ma confiance en lui et toute la tendresse que j'éprouvais ne suffisait pas à ce qu'on devienne aussi proche que dans le temps... j'étais peut-être devenu trop conscient des choses, ou alors il ne voulait pas s'encombrer d'un boulet comme moi... oui, ma confiance en lui ne m'empêchait pas de sapper ma confiance en moi de temps en temps...

- Ne Kyo tu veux bien passé le restant de la nuit avec moi ?

Dans le genre "paroles à la légère" lui aussi il se posait là hein! Combien de fois est-ce que j'avais des paroles de ce genre, bon bien sûr elles avaient un réel sens alors que ce soir elles n'étaient pas aussi tendancieuses mais quand même... mon "je t'aime" non plus n'était pas le même que ceux que j'avais pu dire à d'autres garçons, il ne voulait pas dire la même chose - même s'il n'en était pas moins intense -...

Je me contentai de faire un sourire amusé - autant ne pas y penser plus, ça ne changerait rien du tout - et je relevai légèrement la tête vers lui, haussant un sourcil.

- Je n'ose même pas imaginer le nombre de femmes qui rêvent que tu leur dises ça.

Mais pourtant oui c'était bien vrai. Avec le physique qu'il avait, ça ne pouvait être que vrai. Toutes ses clientes devaient espérer jusqu'au dernier moment de la soirée qu'il prononce ces paroles pour lui sauter dessus... d'ailleurs peut-être qu'il l'avait déjà fait, m'enfin ça ne me concernait pas, et c'était quelque chose que je ne voulais même pas savoir!

Je me redressai et m'écartai de lui, lâchant sa main sur même coup, je m'appuyai à nouveau contre la rambarde. Mon regard se posa sur l'intérieur de l'appartement - qui me paraissait tout aussi familier que mon propre appartement - avant de revenir sur Hisaki.

- Mais... c'est d'accord. En revanche, je te garantis pas de rester éveillé très longtemps.

Je souris, je n'étais qu'un humain après tout et j'avais besoin de mon quota d'heures de sommeil si je ne voulais pas avoir totalement l'air d'un zombie. Heureusement pour moi, je n'avais absolument besoin que de 6h de sommeil, mais quand je pouvais faire des grasses matinée je ne m'en privais pas... je pense qu'il n'y avait personne qui pouvait aimer autant que moi rester simplement dans son lit à se prélasser au chaud d'une grosse couette.

- Je n'ose même pas imaginer le nombre de femmes qui rêvent que tu leur dises ça.

- Mais... c'est d'accord. En revanche, je te garantis pas de rester éveillé très longtemps.

- Je vais alors allé préparer le lit ce serait pas malin que tu meurs de chaud dans ce lit.

- Il faut bien tourner la page un jour ne ?

Dormir ici... avais-je déjà dormi hors de mon appartement depuis que j'étais arrivé sur l'île? Non, pas que je me souvienne... je ramenais toujours mes amant chez moi, je n'aimais pas spécialement dormir chez d'autres personnes. Je ne m'y sentais pas à l'aise, personne ne le savait, je m'étais toujours débrouillé pour proposer mon appartement le premier et personne n'avait jamais refusé - pourquoi l'auraient-ils fait de toute manière? -. Mais cela dit, ici, je m'y sentais presque chez moi. Est-ce que c'était parce que tous les appartements du lotissement devaient se ressembler? Ou bien parce qu'il s'agissait de celui de Hisaki? Toutes les pièces, chaque meuble, chaque objet était imprégné de la présence de mon vampire, cette présence qui me rappelait tant de souvenirs et qui me faisait éprouver tant de choses.

- Je vais alors aller préparer le lit ce serait pas malin que tu meurs de chaud dans ce lit.

Je n'eus le temps de rien dire qu'il était déjà rentré dans l'appartement. Il n'avait pas à "préparer" le lit, je me serais contenté de dormir sur les couvertures si j'avais eu chaud, ce n'était pas la peine qu'il s'embête pour moi. Je n'étais pas du genre à faire des manières - même si ça m'arrivait sans doute quelques fois -, mais je supposais que je ne l'aurais pas pu l'empêcher de faire ça pour moi, il était comme ça après tout.

Je soupirai doucement, un sourire toujours présent sur les lèvres et je me redressai pour entrer à mon tour dans l'appartement, le plus doucement possible pour qu'Hisaki ne se rende pas compte de ma présence. Je me dirigeai vers la chambre, glissant mon regard à nouveau sur la décoration de l'appartement. J'arrivai près de la porte, j'allais poser ma main sur la poignée quand j'entendis sa voix.

- Il faut bien tourner la page un jour ne ?

Mes doigts effleurèrent à peine la poignée, mais cela fut assez pour la faire claquer - chose qu'un humain n'aurait même pas remarqué, mais un vampire, si -, j'ouvris donc carrément la porte pour qu'il n'ait pas l'impression d'être espionné. Ce n'était pas ce que j'avais l'intention de faire de toute façon, quand je voulais savoir quelque chose je le demandais purement et simplement. Je vis qu'il changeait les couvertures du lit et je réprimai un soupir. Je laissai mon regard parcourir la chambre qui me paraissait nettement moins familière que le reste de l'appartement sans que je sache pourquoi, et mon regard fut attiré par un cadre posé sur l'un des meubles, je m'approchai et l'attrapai doucement pour le regarder? Encore une fois, non, je n'avais aucune gêne mais c'était bien avec Hisaki que je pouvais le plus me laisser aller.

J'observai attentivement la photo, elle représentait Hisaki et une jeune femme sublime, brune, les yeux bleus, élancée, des traits sans défauts... la femme parfaite, et sans doute parfaite pour Hisaki. Ils souriaient et portaient chacun un anneau à la main gauche, ce qui me fit comprendre brusquement qui était cette femme. Heureusement que j'étais dos à mon vampire, je crois que ce fut cette pensée qui me traversa aussitôt... je ne voulais pas qu'il se rende compte que mon regard devait être devenu moins agréable d'un coup, et je soupirai doucement pour me calmer. Alors, il avait été marié... je reposai le cadre sur le meuble et détournai les yeux vers la fenêtre.

C'était sûrement à elle qu'il demandait pardon au temple, je ne savait pas pourquoi il pouvait vouloir son pardon, mais j'étais certain que c'était ça... elle avait sans doute était très importante pour lui, et moi je venais de prendre un sacré coup. Il avait du passer des années et des années près d'elle... je soupirai à nouveau en sentant des larmes me monter aux yeux, non mais pourquoi ça me touchait autant? C'était vraiment n'importe quoi! Je les refoulai et me retournai vers Hisaki en souriant.

- Elle est magnifique... je ne savais pas que tu t'étais marié.

Je m'approchai de lui, pourtant une partie de moi aurait bien voulu quitter l'appartement... mais je ne pouvais pas partir, pas comme ça, pas pour ça, c'était stupide, Hisaki se demanderait ce qui se passait, et moi-même je ne savais pas pourquoi cela m'affectait autant... peut-être qu'au fond, je m'étais dit bêtement que depuis qu'il était devenu vampire, j'étais l'humain qu'il aimait le plus, mais évidemment ce n'était pas la vérité. Il avait du même beaucoup aimer cette femme, tenir à elle énormément pour se marier avec elle malgré qu'il soit vampire et outrageusement prudent.

- Ne t'ennuies pas pour moi, je vais le faire.

Ce disant, je lui pris les couvertures des mains et terminai rapidement de faire le lit. Il fallait que j'arrive à penser à autre chose, qu'on change de sujet... j'espérais vraiment qu'il n'aurait pas brusquement l'envie de m'en dire plus sur elle. Je ne le voulais pas vraiment, je crois que je devais être jaloux d'elle... Depuis que nous nous étions réconcilié, je ne cessais de me dire qu'il était mon vampire, maintenant que je me rendais compte que ça n'avait probablement jamais été le cas, j'avais royalement chuté.

- Elle est magnifique... je ne savais pas que tu t'étais marié.

- Ne t'ennuies pas pour moi, je vais le faire.

- Il y a des fois quand on évite de dire des choses aux autres c'est pour les oubliés. Mais oui j'ai déjà été marier...

- Il faut bien essayer d'avoir une vie pour cacher sa nature non ?

- Si tout ça avait été plus simple.

Je soupirai silencieusement en me redressant après avoir terminé de mettre la couverture, et Hisaki s'assit au pied du lit, je détournai les yeux. Il y avait brusquement un froid dans la chambre, décidément il n'y avait qu'avec lui que j'arrivais à ressentir ce genre d'ambiance... je m'efforçais moins d'être toujours souriant même si je n'aimais vraiment pas la tension qui se tissait. J'avais abordé un sujet épineux visiblement, et dont même moi je ne voulais pas parler au final... qu'est-ce qui m'avait pris? Je voulais juste savoir quelque chose en plus sur lui, est-ce que c'était bien? Peut-être que lui, contrairement à moi, il préférait que je ne sache pas tout sur lui. Et c'était sans doute normal...

- Il y a des fois quand on évite de dire des choses aux autres c'est pour les oublier. Mais oui j'ai déjà été marié...

Je relevai les yeux vers lui, me mordant la lèvre. Il voulait l'oublier? Qu'il me dise ça ne faisait qu'alimenter cette curiosité qui s'épanouissait dans mon esprit bien malgré moi. Pourquoi est-ce qu'il voulait l'oublier? Cela semblait le faire souffrir, je voulais savoir ce qui s'était passé, ce qui l'avait blessé pour essayer d'alléger sa peine. Est-ce que je pourrais faire ça? Je n'en savais trop rien mais c'était ce que je désirais.

Mais... même s'il ne voulait pas en parler "aux autres", moi je n'étais pas n'importe qui après tout... je n'étais pas "les autres" on était ami et c'était pas le genre de choses qu'on se cachait entre ami... certe il y avait des sujets qu'on était pas forcément obligés d'aborder mais quand même, ça, c'était important... il s'était marié, c'était important. Mais bon, peut-être que je me faisais juste des idées, et que j'idéalisais encore un peu trop ce qu'il pouvait y avoir entre Hisaki et moi...

- Il faut bien essayer d'avoir une vie pour cacher sa nature non ?

Je détournai la tête alors qu'il se levait et quittait la chambre. Je me laissai tomber sur le lit et fermai les yeux. Oui, là, c'était sûr, j'avais pas choisi le meilleur sujet pour discuter... mais encore une fois, je ne voulais pas vraiment en discuter. Cela dit, même s'il ne le voulait pas non plus, je ne m'attendais pas à ce qu'il me parle de cette manière. Je me sentais mal, comme si je ne comprenais rien à rien... comme s'il estimait que je n'étais pas apte à comprendre ce qu'il vivait. C'était peut-être le cas, mais ce n'était pas faute d'essayer... je n'étais qu'un simple et banal petit humain et je voulais m'élever au niveau de mon vampire d'ami, c'était perdu d'avance.

Je m'allongeai sur la couverture et passai une main sur mes yeux larmoyants. Bon au moins il n'était pas là pour voir que je pleurais. Je ne savais même pas pourquoi je pleurais... habituellement, je pleurais jamais, pourquoi est-ce qu'il fallait que Hisaki parvienne si facilement à briser la carapace que j'avais formé autour de ce qui pouvait me faire paraître faible? Je prenais toujours tout bien, on pouvait me dire les pires choses, depuis le collège je m'étais interdis de laisser les autres m'atteindre... est-ce que c'était parce que je connaissais Hisaki depuis que j'étais petit que je réagissais comme ça à sa présence? A ses paroles?

Je soupirai et me redressai avant de me relever totalement. Je pouvais pas laisser ça comme ça, il fallait que j'aille lui parler. Je ne savais même pas quoi lui dire en fait, mais je savais que je devais m'excuser. Je sortis de la chambre et retournai au salon. Comme je le pensais, il était sur le balcon et dos à moi. Je me dirigeai aussitôt vers lui et ne m'arrêtai que lorsque je fus tout contre son dos, je passai alors mes bras autour de sa taille pour me serrer contre lui.

- Gomen ne...

J'enfouis mon visage contre son épaule en sentant que les larmes n'avaient finalement pas décidé de m'écouter, et qu'elles roulaient à nouveau sur mes joues. Je ne voulais pas qu'il me voit pleurer même s'il allait forcément s'en rendre compte.

- Je n'aurais pas du parler de ça, je te demande pardon... c'est juste que j'ai été surpris de voir cette femme en photo avec toi. Et j'insisterais pas, tu m'en parleras quand tu voudrais, ou pas du tout c'est pas grave, ça change rien de toute manière...

Je reniflai doucement et soupirai. Je ne voulais pas qu'il soit faché contre moi juste à cause de ça, ou qu'il s'imagine que j'allais le harceler jusqu'à ce qu'il m'en dise plus. Honnêtement, j'étais complètement capable de faire une telle chose, mais si ça devait me couter mon amitié avec Hisaki alors je n'ajouterais rien de plus sur le sujet. Et puis, qu'il ait été marié ou non, au fond qu'est-ce que ça changeait? Notre lien n'avait rien à voir avec elle, et cela remontait à plus loin que ça en plus alors...

- Tu... tu m'en veux? hoquetai-je.

Je voulais savoir, je voulais qu'il me le dise parce que je saurais tout de suite s'il me mentait... mais une chose était sûre, je n'essaierais plus de lui parler de son passé, si cela devait nous mettre en froid ça n'en valait pas le coup. De toute manière, c'était peut-être moi le problème, la façon dont je voyais les choses et mes relations avec les gens étaient peut-être anormale. J'avais sans doute gardé un souvenir trop vif et trop douloureux de la relation de mes parents... je ne voulais pas agir comme ils l'avaient fait, pour quoi que ça puisse être...

- Gomen ne...

- Eh ?

- Je n'aurais pas du parler de ça, je te demande pardon... c'est juste que j'ai été surpris de voir cette femme en photo avec toi. Et j'insisterais pas, tu m'en parleras quand tu voudrais, ou pas du tout c'est pas grave, ça change rien de toute manière...

- Tu... tu m'en veux? hoqueta-t-il

- Mais bien sur que non. Je ne t'en veux pas. Ce n'est pas ta faute bébé...

- J'aurais sans doute du te le dire que je me suis marié. Mais je veux fuir et oublié cette partie de ma vie...C'est pas contre toi...Mais je ne suis pas près pour en parlé...Car j'ai peur...

- Tu pourrais me voir différemment...tu n'allais pas te coucher ?

L'instant qui s'écoula après ma pauvre question fut court, tellement que j'eus à peine le temps de me rendre compte de l'idiotie de ma situation. Je n'étais plus comme d'habitude, c'était évident. J'avais l'impression d'être un double bien trop émotif de moi-même en fin de compte, est-ce que c'était quelque chose de mauvais? Je n'en savais trop rien... tout ce qui m'apparaissait, c'était que j'étais pas habitué à ça, et que ça me perturbait un peu. Je n'étais pas du genre à étaler ce genre de sentiment, j'allais même jusqu'à totalement les refouler alors...

Se posant sur mes bras, les mains de Hisaki me sortirent de mes pensées, et il se retourna vers moi avant que j'aie eu le temps de passer mes mains sur mon visage pour essuyer les larmes sur mes joues. Non, je ne voulais définitivement pas qu'il me voit pleurer, qu'il m'entende était déjà bien assez gênant... Sa main se posa sur ma joue et sa chaleur - bien que moindre par rapport à tout à l'heure - me fit frissonner légèrement. Il m'attira à nouveau contre lui et je fermai les yeux lorsque ses doigts se glissèrent dans mes cheveux

- Mais bien sur que non. Je ne t'en veux pas. Ce n'est pas ta faute bébé...

Mon coeur fit un bond à nouveau, j'aimais décidément beaucoup ce surnom. Je posai mes mains sur ses hanches et agrippai doucement son chandail alors que j'essayais de faire cesser mes larmes qui s'étaient néanmoins calmées lorsqu'il avait posé ses mains sur les miennes. Il ne m'en voulait pas, cela me rassurait. Je ne voulais pas faire la moindre chose qui pourrait lui donner envie de s'éloigner de moi, ou qui lui montrerait à quel point je méritais pas d'être à ses côtés. Même si je savais que, tôt ou tard, ça arriverait et qu'à ce moment je n'y pourrais malheureusement rien... j'espérais néanmoins qu'à ce moment-là je serais devenu plus fort.

- J'aurais sans doute du te le dire que je me suis marié. Mais je veux fuir et oublier cette partie de ma vie... C'est pas contre toi... Mais je ne suis pas prêt pour en parler... Car j'ai peur...

Que pouvais-je répondre à cela? J'aurais pourtant tellement voulu qu'il n'y ait rien de ce genre pour le tourmenter... n'avait-il pas déjà assez subi en étant devenu un vampire? Cela dit, cette femme paraissait vraiment gentille, est-ce que c'était elle qui avait fait quelque chose? Ou bien lui..? Non, je ne préférais même pas y penser, surtout s'il ne voulait pas en parler, ça ne servait à rien...

- Tu pourrais me voir différemment...tu n'allais pas te coucher ?

Je rouvris les yeux alors qu'il m'écartait de lui. Je le regardai en haussant les sourcils, mais lui me souriait. Le sujet était clos, c'était ce que je devais comprendre n'est-ce pas? Et je ne pouvais plus rien dire, je ne voulais pas amorcer à nouveau la conversation là-dessus en lui rappelant que rien, absolument rien ne pourrait changer la façon dont je le voyais, rien ne me pousserait à lui tourner le dos, rien ne détruirait la tendresse que j'avais pour lui, c'était impossible. Il était bien trop important pour moi pour que je laisse la moindre chose s'immiscer entre nous.

Mais même si je ne pouvais plus lui dire maintenant, je trouverais bien un moyen de le lui faire comprendre afin qu'il n'ait plus jamais de doute là-dessus. Pour le moment, rester près de lui malgré les mystères qu'il faisait sur son passé suffirait peut-être à calmer les peurs qu'il pourrait avoir.

J'aurais voulu lui rendre son sourire, mais cela m'était complètement impossible. Au lieu de ça, je baissai la tête et remontai mes mains sur son torse avant de me pelotonner contre lui une nouvelle fois. Comme un enfant fatigué, j'avais besoin de câlins pour m'éviter des rêves sombres.

- Oui mais... reste avec moi alors... s'il te plait.

Si j'étais venu là, c'était pour le voir. On n'avait pas passé beaucoup de temps ensemble alors je voulais rester avec lui jusqu'à ce que mes yeux se ferment tous seuls à cause du sommeil que je refuserais tant qu'il ne m'empêcherait pas de penser normalement.

- Je sais que ce sera pas forcément drôle pour toi de rester avec quelqu'un qui somnole, mais si je sais que tu es dans la pièce à côté, je pourrais pas me résoudre à rester couché.

Je pouvais bien avoir l'air d'un gamin, je m'en fichais parce que pour le coup j'étais réellement comme ça. S'il ne restait pas avec moi jusqu'à ce que je m'endorme alors je n'irais pas me coucher, je m'endormirais sûrement n'importe où mais près de lui. Je ne le forçais pas à rester avec moi où que j'aille, mais moi je serais avec lui de toute manière. Je savais que demain, en dehors d'ici on redeviendrait bien moins proche que je me plaisais à l'être ce soir. Mais c'était normal, si les gens nous voyait agir comme ça, ils se poseraient des questions, et les personnes du club - employés j'entends - me prendraient pour un taré suicidaire. Je devais l'être sans doute... mais c'était mon problème.

- Oui mais... reste avec moi alors... s'il te plait.

- Je sais que ce sera pas forcément drôle pour toi de rester avec quelqu'un qui somnole, mais si je sais que tu es dans la pièce à côté, je pourrais pas me résoudre à rester couché.

- Alors, je resterais avec toi si c'est ce que tu veux. Si cela peut t'aider a dormir...

- Comme ça c'est bien ? Je vais rester jusqu'à ce que tu sois vraiment endormis.