# Terminé~ Un an de plus [Hisaki]

Cinq années s'étaient écoulées... aujourd'hui était le jour qui entamait la sixième année où je devrais vivre sans elle - la journée elle-même était juste entamée d'ailleurs -. La perspective de cette journée ne m'enchantait pas vraiment, car je savais que je n'arriverais pas à sortir de mon appartement - même si je n'aurais pas le choix le soir -. C'était ainsi chaque année, comme si ce jour-là je m'autorisais à ne pas arborer ce visage souriant que je servais aux autres tout le reste de l'année. Voilà pourquoi je restais seul, je ne voulais pas que les gens me voient ainsi car je serais obligé de mentir, et je n'aimais pas spécialement ça. J'avais tellement l'habitude de toujours m'amuser de tout, que lorsque je ne le faisais pas les gens me posaient des questions et s'enquissaient gentiment de mon état. Devais-je en être heureux? Sans doute que oui, et en temps normal je l'étais... mais ce jour précisément, cela m'ennuyait.

Il était 4h du matin, et je venais de sortir du Club. J'étais parti avant les autres pour une fois, je m'étais éclipsé subtilement pour que personne ne me retienne, mais je ne tenais pas à ce que quelqu'un entame une conversation que nous serions obligés de continuer tout en rentrant au lotissement. Je devais aller à un endroit ce soir, j'y allais quand il n'y avait personne pour m'ennuyer. Depuis cinq ans je faisais ça, ce n'était pas parce que cette année j'étais sur cette île, ou bien que je portais un kimono que je ne devrais pas porter à cet endroit, que je changerais cette habitude. Personne ne me verrait de toute manière, je pouvais bien faire ce que je voulais... et ce n'était pas une simple lubie, il fallait que j'y aille... parce que je savais que lui, il n'irait pas. Je savais bien que pour lui, elle n'existait plus depuis longtemps.

Oubliant ces pensées malheureuses, je retirai mes getas pour ne pas faire de bruit et je pressai le pas pour me rendre rapidement au temple. Les rues étaient assez éclairées, et à cette heure-ci de toute façon, les gens étaient soit chez eux, soit dans des endroits particuliers, mais en pleine rue je pouvais me dire que j'étais tranquille. Les gens avec qui je travaillais, et certains autres que je fréquentais, savaient que ma mère était morte, mais j'avais toujours gardé pour moi la date, pour que personne n'ait la brillante idée de vouloir m'accompagner pour "me réconforter". Au moins, je serais libre de penser aux souvenirs que j'avais d'elle. C'était le seul moment de l'année où je le faisais... et je le lui devais, qui d'autre le ferait sinon?

Je m'arrêtai finalement après une bonne dizaine de minutes de marche. J'étais enfin au bas des marches, les lumières étaient bien moins nombreuses et moins violentes que dans le reste de la ville, mais c'était sans doute plus que normal. Je posai ma main libre sur la rampe et commençai à monter, lentement, de toute façon vu le nombre de marches je risquerais sans doute de ne pas arriver en haut si je me précipitais.

- Il t'arrive souvent de venir au temple en pleine nuit ?

Je me demandais combien de temps mon père se comporterait de la sorte. Est-ce qu'un jour il réussirait à penser à nouveau à ma mère? J'aurais tellement voulu... j'aurais voulu savoir ce qu'il ressentait lorsqu'il se couchait et qu'elle n'était pas là, lorsqu'il se réveillait sans elle, lorsqu'il se retrouvait seul à la maison, lorsqu'il voyait la place vide en face de lui lorsqu'il prenait ses repas. Mangeait-il seulement à la maison? Et en ce moment? Dormait-il ou s'occupait-il l'esprit avec des papiers? Niait-il tout simplement le passé comme toujours?

- Il t'arrive souvent de venir au temple en pleine nuit ?

Je poussai un cri et me retournai brusquement. Je crois que j'aurais même été capable de lancer mes getas sur l'intrus si je ne l'avais pas reconnu aussitôt. D'ailleurs comment se faisait-il que sa voix soit aussi bien imprimée dans ma mémoire? Pourquoi fallait-il qu'elle le soit? Même sa présence je la reconnaissais alors que nous étions dans la pénombre.

- Putain mais t'as décidé de me tuer d'une crise cardiaque c'est ça!?

J'avais parlé brusquement, mais sans crier, je ne voulais pas alerter les gens tout de même... et puis deux personnes qui se baladent à cette heure-ci, même ici ça pourrait paraitre suspect. Je soupirai longuement et m'appuyai sur la rambarde. ça aurait été n'importe qui d'autre, j'aurais pu lui renvoyer la question... mais pour un vampire, il pouvait bien être où il voulait à l'heure qu'il voulait.

- Et puis qu'est-ce que ça peut bien te faire?

Je me redressai et recommençai à monter les marches, mais plus rapidement je ne voulais pas m'attarder s'il était dans les parages. Je ne voulais pas avoir à donner d'explication alors moins je resterais moins il serait tenté de faire la conversation, d'ailleurs ça m'étonnait qu'il m'ait adressé la parole.
Malheureusement, comme je l'avais pensé, à monter trop vite je n'arriverais pas tout en haut... et même, je trébuchai.

- Putain mais t'as décidé de me tuer d'une crise cardiaque c'est ça!?

- Et puis qu'est-ce que ça peut bien te faire?

- Baka tu as prévue de te casser une jambe ?

- J'espère que tu voulais toujours continuer de monter au moins

Je n'eus pas le temps de réagir, mais lui si et je sentis son bras passer autour de ma taille, ce qui me fit frémir. Je n'aimais pas être trop proche de lui, sans savoir pourquoi... je pense qu'au fond je craignais que son pouvoir vampirique m'empêche de continuer à lui en vouloir. Ce serait trop facile.

- Baka tu as prévu de te casser une jambe ?

Il me fit un sourire que j'évitai en détournant la tête. J'avais pas fait exprès de tomber quand même, en plus c'était de sa faute. S'il n'était pas là je ne me serais pas dépêché à monter, et je n'aurais pas envie de partir. Pourtant il fallait bien que je reste, et ma mère valait cet effort de ma part. Si je n'y allais pas maintenant, je n'aurais plus l'occasion d'y aller aujourd'hui sans me faire voir... bon, avec un peu de chance il ne resterait pas et me laisserait tranquille. Sinon je devrais l'endurer, mais pour une fois alors je ne m'éterniserais pas dans le coin.
J'allais me redresser pour recommencer à monter, mais il me prit dans ses bras soudainement. Eh non mais puis quoi encore!? Je savais encore marcher que je sache! Néanmoins, je ne me débattis même pas, je savais que ça ne servirait à rien, j'étais qu'un pauvre humain. Je croisai mes bras sur mon torse, m'empêchant de regarder son beau visage - beh quoi? j'allais quand même pas le nier -. Heureusement que personne ne nous voyait, j'aurais l'air de quoi à me laisser porter de cette manière? Bon pas que ça me gêne en temps normal, je m'en amusais même mais là c'était différent...
On arriva - enfin - en haut des marches et mes pieds retouchèrent le sol. Il fit quelques pas pour s'éloigner de moi puis me regarda.

- J'espère que tu voulais toujours continuer de monter au moins.

J'émis un léger grognement boudeur et le regardai entrer à l'intérieur du temple. Bien sûr que je voulais toujours monter, c'était pas sa présence qui m'empêcherait de faire ce que j'avais à faire après tout. J'évitais rarement les gens, même ceux que je ne portais pas spécialement dans mon coeur, alors je ne ferais pas de cas à part pour lui.

- Tu me demandes ce que je fais là en pleine nuit, mais un vampire dans un temple c'est pas étrange peut-être?

J'avais parlé bas, mais je savais que de toute façon il m'entendrait. Bon, de toute façon ça m'importait bien peu ce qu'il pouvait faire ici, autant que lui devait se ficher de ma présence d'ailleurs... Je soupirai silencieusement et détachai mes cheveux, puis j'entrai à mon tour dans le temple.
Je m'approchai de l'un des autels et m'agenouillai devant, posant mes getas à côté de moi. J'allumai une bougie et claquai mes mains avant de fermer les yeux, murmurant tout bas des paroles pour ma mère.
Bon, cela m'ennuyait définitivement beaucoup qu'il soit là, mais j'avais dit que je ne changerais pas mes habitudes pour lui, aussi je parlais toujours à ma mère, alors aujourd'hui aussi je le ferais.

- Tu me demandes ce que je fais là en pleine nuit, mais un vampire dans un temple c'est pas étrange peut-être?

- Est-ce que tu m'as accordé finalement ton pardon ?

Le silence régnait dans le temple en dehors de mes chuchotis. J'aimais croire, dans ces moments-là, que ma mère était quelque part là-haut, l'oreille collée contre une porte pour écouter ce que je disais... c'est ce qu'elle m'avait appris quand j'étais petit, car mon père détestait ça et elle aimait beaucoup l'embêtait. Je devais avoir juste 4 ans, pourtant je ne pourrais jamais oublier son visage quand il me voyait, là, écoutant des mots que je ne comprenais même pas pour la plupart. Alors je partais en courant et il me rattrapait et me serrait dans ses bras en me disant, toujours une fois de plus, que ce n'était pas bien de faire ça.

Mais ma mère et moi avions bien vite laissé tomber cette habitude lorsqu'il avait obtenu sa promotion. Il était toujours furieux sans qu'on sache pourquoi et il en voulait toujours à ma mère pour quelque chose. J'aurais voulu être assez grand pour la protéger, pour renvoyer paitre mon père comme je le faisais à présent. J'aurais voulu pouvoir lui faire comprendre que son comportement la blessait et que chaque soir lorsqu'elle venait me voir après j'étais censé m'être endormi, je l'entendais pleurer.

Maman... si tu savais comme je m'en voulais de ne pas pouvoir rentre à Papa tous ces coups qu'il te donnait et que je ne devais pas voir. Chaque larme que tu versais me donnait une raison de plus de le haïr, pourtant je sais que j'étais tout ce qui lui restait à présent alors je ne pouvais pas le renier, et puis si je le faisais, tu m'en voudrais tellement de l'avoir abandonné.

Je passai une main sur mon visage en soupirant longuement, mon coeur me faisait mal mais j'avais l'habitude, chaque année c'était la même chose alors...

- Est-ce que tu m'as accordé finalement ton pardon ?

Je tournai la tête vers Hisaki, et fus surpris qu'il soit en train de prier. Avais-je une opinion des vampires un peu trop mauvaise?... Non, je savais pertinemment que c'était la façon dont je voyais Hisaki qui me révélait que je lui en voulais toujours, voilà pourquoi je voulais lui voir les pires défauts. Mais j'étais dans mon droit après tout.

Je rebaissai les yeux sur la bougie que j'avais allumée pour ma mère, et un courant d'air la souffla. Je m'inclinai en lui murmurant un dernier au revoir, puis j'appuyai mon dos contre un pilier à côté de moi. Je renouai mes cheveux qui me tombaient dans la nuque, avec la chaleur qu'il faisait ce n'était pas très agréable.

Après un court instant de silence, je décidai de lui adresser à nouveau la parole. Cela ne me tuerait pas, et puis s'il ne voulait pas me parler il partirait simplement, ce serait pas la première fois.

- Les Hôtes savent ce que c'est de vouloir le pardon de quelqu'un? ironisai-je. Etonnant, j'aurais appris quelque chose ce soir.

Je détournai la tête vers les cloches. J'avais dit "Hôtes" mais je savais qu'il comprendrait que je parlais des vampires. Je ne pouvais pas me risquer trop à parler de vampires, il pourrait y avoir quelqu'un dans le temple qui pourrait nous entendre, et ce serait très ennuyeux. J'avais évidemment conscience de la bêtise de mes paroles, et que ce n'était pas vraiment gentil non plus, mais qu'y pouvais-je c'était le seul genre de paroles qui me venaient quand je lui parlais... Je soupirai.

- M'est avis qu'il est bien plus utile de continuer à s'excuser que de demander ainsi le pardon de quelqu'un... mais ce n'est que ma façon de voir.

Je remontai mes genoux contre mon torse et les entourai de mes bras avant de poser ma tête dessus. Je fermai les yeux, l'endroit était apaisant, j'aimais cette ambiance qui était tellement loin de celle du reste de l'île. Comme un monde à part, si j'avais su je serais venu ici plus tôt... mais j'avais peur que les gens s'en rendent compte et qu'on m'interroge, car ça n'était pas ma façon d'être c'était certain. Et je crois que j'étais un peu gêné que Hisaki soit là pour le voir, lui plus que quiconque, je ne voulais pas lui montrer la moindre de mes faiblesses.

- Les Hôtes savent ce que c'est de vouloir le pardon de quelqu'un? Etonnant, j'aurais appris quelque chose ce soir.

- M'est avis qu'il est bien plus utile de continuer à s'excuser que de demander ainsi le pardon de quelqu'un... mais ce n'est que ma façon de voir.

- Comme tout le monde nous pouvons avoir des regrets. Mais seul ceux qui leur reste quelque chose d'encore humain peuvent l'éprouver.

- Mais de toute façon tu t'en fiche puisque c'est moi non?

Je ne savais pas vraiment quelle était la meilleure façon de me comporter avec lui, et même si j'y réfléchissais, j'étais persuadé que je n'arriverais pas à m'en tenir à mes résolutions... peut-être que je lui en voulais depuis trop longtemps pour pouvoir être totalement indifférent à présent. Mais ça ne valait sans doute pas le coup de changer maintenant, je devais juste me laisser le temps de guérir cette cicatrice qui s'était rouverte après dix ans...

Je rouvris les yeux en l'entendant bouger, il faut dire qu'avec le silence qu'il y avait ici, le moindre bruit était décuplé... Il s'était tourné vers moi et avait mis ses mains dans ses poches.

- Comme tout le monde nous pouvons avoir des regrets. Mais seuls ceux qui leur reste quelque chose d'encore humain peuvent l'éprouver.

Je me retins de lui demander si c'était le cas pour lui. Mieux valait sans doute que je ne continue pas mes sarcasmes, ça l'énerverait plus qu'autre chose... déjà que je devais commencer à lui taper sur les nerfs. Je devais avouer que c'était un peu mon but, même si l'éloigner de moi n'arrangerait certainement pas les choses. Quoiqu'il était sans doute plus sûr, maintenant que je savais qu'il était un vampire, que je reste à une certaine distance de Hisaki, ainsi je ne risquerais rien.

- Mais de toute façon tu t'en fiche puisque c'est moi non?

J'haussai les sourcils et le regardai s'éloigner. Non parce qu'en plus c'était sur moi que ça retombait? C'était quand même pas moi qui avait tous les torts... et puis oui je m'en fichais de ce qu'il pouvait faire ou penser ou encore ressentir, parce que lui aussi s'en fichait pas mal!

- C'est plutôt à moi de te dire ça! C'est toi qui m'as rayé de ta vie en premier, non?

Je fronçai les sourcils et regardai à nouveau devant moi. J'appuyai ma tête contre le pilier en soupirant. Ah voilà maintenant je me donnais l'air de quoi? C'était la première fois depuis qu'on s'était revu que j'osais parler de ça... c'était comme si j'avais voulu l'oublier jusqu'à présent. Au fond, c'était sûrement le cas, mais au bout d'un moment il fallait bien en parler.

- T'es comme tous les autres de toute façon, chuchotai-je d'une voix boudeuse et enfantine malgré moi. Je sais même pas pourquoi j'ai cru que tu étais différent... c'était si évident que tu partirais aussi vite et mystérieusement que tu étais arrivé.

Il s'était bien fiché de ce que je pouvais ressentir à cette époque-là. C'était le seul adulte en qui j'avais confiance, même mes parents m'ignoraient, je n'avais que lui et il était parti.

- C'est plutôt à moi de te dire ça! C'est toi qui m'as rayé de ta vie en premier, non?

- T'es comme tous les autres de toute façon, chuchota-t-il. Je sais même pas pourquoi j'ai cru que tu étais différent... c'était si évident que tu partirais aussi vite et mystérieusement que tu étais arrivé.

- Ne me compare surtout pas a ce monde qui n'ont pas de sentiment ou qui ce fiche des autres car tu as tord.

- Tu ne sais rien alors tais-toi !

Je n'aimais pas repenser à cette partie de mon enfance, elle avait été si douloureuse... alors que je pensais que ça allait mieux, j'étais tombé de très haut, de trop haut, et c'était sa faute. Et j'avais passé tant de temps à le chercher, parce que je voulais pas m'avouer que lui aussi avait été capable de m'abandonner. Il était la personne la plus précieuse pour moi, mais je m'étais juste trompé sur lui en fait.

Je relevai la tête en entendant ses pas s'approcher de moi, et je me figeai en voyant qu'il était si près, évidemment il était trop rapide pour que je puisse suivre ses mouvements, mais quand même c'était pas la peine d'être aussi réactif.

- Ne me compare surtout pas à ce monde qui n'ont pas de sentiments ou qui se fiche des autres car tu as tort.

Je tressaillis et mon coeur cessa de battre une seconde. C'était la première fois que je l'entendais parler sur ce ton... que ce soit à moi ou non, il s'énervait rarement à ce point, mais lui comme moi agissions différemment l'un envers l'autre. Mais j'aurais voulu ne pas faire de différence pour lui, j'aurais voulu même oublier chacun des souvenirs que j'avais avec lui, ils auraient au moins cessés de me torturer l'esprit.

Il s'éloigna et je serrai les mâchoires. J'avais totalement raison et son départ précipité en était la preuve. Comment pouvait-il oser prétendre le contraire?

- Tu ne sais rien alors tais-toi !

Je me relevai et me rapprochai de lui, sentant la colère monter en moi aussi. Je me fichais bien du danger d'être près de lui alors qu'il était en colère. Mais je m'en fichais bien, j'étais peut-être totalement inconscient mais ça avait toujours été comme ça, je ne l'avais jamais réellement craint, même en sachant ce qu'il était... mais je me refusais à présent de reconnaître qu'au fond j'avais encore confiance en lui. Peut-être était-ce fou de me dire qu'il ne me ferait pas de mal, mais je n'y pouvais rien.

- J'ai raison et je le sais! Si tu n'étais pas comme les autres tu ne serais pas parti comme tu l'as fait! Si tu te souciais de moi tu serais pas parti!

Je fulminai. J'étais autant énervé contre lui que contre moi de me laisser aller de cette manière. C'était pire devant lui et je ne savais pas trop pourquoi, mais je m'en fichais ça ne comptait pas spécialement.

- Et tu dis que je ne sais rien, mais toi est-ce que tu sais ce qui s'est passé après ton départ? Est-ce que tu sais ce que j'ai enduré après que tu m'aies abandonné toi aussi!!?

Je passai une main sur mon visage. Je ne me sentais pas bien, crier dans cet endroit me paraissait étrange, c'était comme si les murs renvoyaient chacun de mes mots. Et je ne voulais pas rester ici, je ne pouvais pas m'expliquer, pas aujourd'hui alors qu'il m'était impossible de ne pas être touché par la moindre chose... et encore plus par cette histoire.

- J'ai raison et je le sais! Si tu n'étais pas comme les autres tu ne serais pas parti comme tu l'as fait! Si tu te souciais de moi tu serais pas parti!

- Et tu dis que je ne sais rien, mais toi est-ce que tu sais ce qui s'est passé après ton départ? Est-ce que tu sais ce que j'ai enduré après que tu m'aies abandonné toi aussi!!?

- Tu ne peux pas savoir a quel point j'ai regretter d'être parti sans te le dire, mais je n'avais pas le choix.

- Ne crois pas que parce que je suis ce que je suis que c'est plus facile pour moi. Je m'excuse si je t'es blessé, je m'excuse si t'a souffert quand, je suis parti...Mais je ne pouvais pas resté.

Je soupirai et secouai doucement la tête. Si quelqu'un du Club nous voyait, j'étais persuadé qu'il penserait que j'étais suicidaire, Hisaki lui-même devait se le demander. C'était la première fois que j'osais l'affronter, et je crois que je n'aurais pas pensé que ça puisse être si difficile, que mes souvenirs et mes sentiments d'enfant pourraient resurgir de cette manière. Mais je devais tenir bon devant lui quand même, je ne voulais pas quand même qu'il sache à quel point cette brusque séparation avait été traumatisante pour moi. Sans compter que mes parents avaient ne me croyaient pas quand je disais que je voulais le retrouver, et où que j'allais, personne ne le connaissait, je ne comprenais pas, j'étais trop petit.

Hisaki me contourna et s'éloigna de quelques pas, je ne le suivis pas du regard, baissant les yeux au sol pour essayer de me reprendre un minimum.

- Tu ne peux pas savoir à quel point j'ai regretté d'être parti sans te le dire, mais je n'avais pas le choix.

Je fermai les yeux et soufflai. C'était facile de dire ça maintenant, de dire qu'on regrettait après avoir fait les choses, qui pouvait savoir si c'était la vérité ou non? Qui pouvait savoir s'il ne disait pas ça simplement pour que je cesse de me comporter de cette manière avec lui, hein? Je me méfiais... sans doute trop, et même si d'une certaine manière je lui faisais confiance, je pensais tout aussi bien que lui accorder mon pardon serait stupide. Il repartirait de tout façon, peut-être pas maintenant, peut-être pas aussi vite qu'à l'époque, mais il repartirait alors autant arrêter les frais dès à présent.

- Ne crois pas que parce que je suis ce que je suis que c'est plus facile pour moi. Je m'excuse si je t'ai blessé, je m'excuse si t'as souffert quand je suis parti...Mais je ne pouvais pas rester.

Je me retournai vers lui, sans toutefois m'approcher de nouveau car je savais qu'il se serait encore éloigné de moi. Il regrettait, il s'excusait mais je n'arrivais pas à en croire un mot. Et ses excuses ne changeraient rien de toute façon...

- C'est trop facile, tu ne comprends pas! Je t'en veux d'être parti, mais je t'en veux bien plus de ne m'avoir rien dit avant! J'avais confiance en toi, je tenais à toi et sans toi je me sentais perdu.

Je n'avais aucune honte et aucune gêne à lui dire ce que je ressentais à l'époque, je n'avais jamais été gêné d'exprimer mes sentiments de toute façon, et c'était de l'histoire ancienne, maintenant ça ne comptait plus. Je le regardai dans les yeux une seconde puis me détournai vers l'entrée du temple. Je ne fis que quelques pas avant de me retourner, j'avais une dernière chose à lui dire.

- Tu pensais quoi? Que parce que j'étais petit je ne comprendrais pas pourquoi tu partais? Ou bien tu te disais que tu n'aurais jamais à affronter ce départ puisqu'on ne se reverrait jamais..?

Je soupirai à nouveau et sortis du temple. Il fallait que je prenne l'air, il fallait que je rentre chez moi et que je sois tout seul maintenant.

- C'est trop facile, tu ne comprends pas! Je t'en veux d'être parti, mais je t'en veux bien plus de ne m'avoir rien dit avant! J'avais confiance en toi, je tenais à toi et sans toi je me sentais perdu.

- Tu pensais quoi? Que parce que j'étais petit je ne comprendrais pas pourquoi tu partais? Ou bien tu te disais que tu n'aurais jamais à affronter ce départ puisqu'on ne se reverrait jamais..?

- T'aurais voulu que je meurs sous tes yeux peut-être ? Si je ne te l'est pas dit que je partais c'est que j'étais suivis et si j'aurais été te voir, je t'aurais mis en danger.

- Mais quand, je suis partit je l'est regretter tu as été le seul ami que j'ai eu...Même dans ma vie d'humain je n'est jamais eu d'ami...Tu as été mon premier et seul ami...

- J'ai mes fautes dans tout ça, je les assumes..

Quel idiot... quel abruti... autant lui que moi d'ailleurs, je devais bien l'avouer. Mais voilà j'étais comme ça, et comme ça n'arrivait qu'une fois par an, c'était pardonnable. Bon, sûrement qu'après ça de toute façon il ne viendrait plus me parler... j'aurais préféré ne pas le croiser aujourd'hui, mais tant pis c'était fait, et je n'étais pas du genre à passer du temps à regretter telle ou telle chose, en grandissant j'avais appris que rien ne pouvait changer le passé, même si on le voulait très fort.

Je m'arrêtai net en voyant Hisaki devant moi. J'ouvris de grands yeux avant de froncer légèrement les sourcils, pourquoi m'arrêtait-il? Pourquoi ne me laissait-il pas partir? Cela valait pourtant mieux pour nous deux qu'on n'envenime pas encore plus les choses.

- T'aurais voulu que je meurs sous tes yeux peut-être ? Si je ne te l'ai pas dit que je partais c'est que j'étais suivis et si j'aurais été te voir, je t'aurais mis en danger.

Je me sentis pâlir et je baissai les yeux. Je... n'avais pas dit... je n'avais quand pas dit un truc de ce genre quand même!! Non mais il me prenait pour quoi!? Mais après ce jour où il avait tué ces mecs pour me protéger, tout ce qui s'était placé dans ma tête était que Hisaki était réellement quelqu'un d'exceptionnel... j'étais bien trop jeune pour avoir une idée des ennuis qu'il pourrait avoir suite à ça, il m'avait protégé c'était tout ce que je savais.

Comment aurais-je pu savoir que cela le forcerait à partir? Et puis... ce n'était pas comme si on ne s'était pas vu suite à ça, il aurait pu... il aurait du m'expliquer qu'il devrait partir parce que des gens le suivaient. Il aurait eu tellement d'occasion de me prévenir qu'un jour ou l'autre il devrait partir et que je devrais reprendre ma vie comme s'il n'avait jamais existé... Pour un gamin de dix ans, chaque chose qui arrive est éternelle, c'est faux bien sûr mais si personne ne lui explique il ne peut pas le deviner.

- Mais quand je suis parti je l'ai regretté tu as été le seul ami que j'ai eu... Même dans ma vie d'humain je n'ai jamais eu d'ami...Tu as été mon premier et seul ami...

Je me mordis la lèvre. Pourquoi disait-il ça dans un moment pareil? C'était douloureux à entendre, même si ce n'était pas forcément le but de ses paroles. J'avais été son premier ami, et il avait été le mien... c'était dommage que notre amitié ait été gâché de cette façon, pourquoi on avait pas eu plus de chance? Tss de toute façon, s'il n'était pas parti à ce moment-là il serait parti plus tard car il ne vieillissait pas. Non, ça ne servait décidément à rien de regretter, sinon à se blesser encore plus qu'on ne l'était déjà... et cette cicatrice que je pensais guérie - ou tout du moins oublié - s'était lentement rouverte et menaçait de ne plus se refermer.

Je le vis tourner les talons, et je m'accroupis, posant mes bras sur mes jambes et y enfouis le bas de mon visage, pour le regarder partir.

- J'ai mes fautes dans tout ça, je les assumes...

Je soupirai silencieusement en sentant les larmes me monter aux yeux. Non, pas maintenant... cela faisait cinq ans que je m'interdisais de pleurer, que je m'exhortais à rester fort pour ne pas montrer aux autres que certaines choses me touchaient, pour faire croire que j'étais un éternel optimiste. Mes premières larmes depuis cinq ans, et pour quelque chose qui m'était arrivé dix ans auparavant... c'était pitoyable... c'était rare quand je me faisais pitié, mais là je me faisais vraiment pitié.

- Peut-être que maintenant... je n'y penserais plus.

Je soupirai silencieusement et frottai doucement mes joues à mes bras pour essuyer mes larmes. Tu vois maman, je peux encore pleurer... tu vois maman, je suis pas aussi insensible que je veux le faire croire...

# Terminé~